Quelle plus-value apportera la nouvelle loi sur les marchés publics aux professionnels de la construction?

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L’an dernier, le Conseil national a révisé la loi sur les marchés publics, afin d’harmoniser notamment les législations fédérale et cantonale. Le projet doit être encore avalisé par le Conseil des Etats, mais il y a fort à parier que les nouveaux principes généraux seront désormais d’ordre économique, écologique et social. Toujours prête à anticiper le mouvement, Infra Suisse, l’organisation professionnelle des entreprises actives dans la construction d’infrastructures, a donc décidé de proposer ce sujet à la réflexion de ses membres et invités dans le cadre de sa Journée Infra.

Près de la moitié de tous les marchés publics concerne le secteur de la construction, représentant quelque 20 milliards de francs suisses par année. C’est dire si le sujet de la nouvelle loi fédérale sur les marchés publics, qui devrait entrer en vigueur dès la mi-2020, est prépondérant pour les professionnels. Infra Suisse l’a bien compris et a réuni une palette d’intervenants pour aborder le sujet selon différents axes. D’un point de vue juridique, la révision ne devrait guère changer la situation, mais force est de constater que la Suisse, Confédération et cantons, ont les mains liées. Comme l’explique Jean-Baptiste Zufferey, Professeur de droit administratif à l’Université de Fribourg : «Les collectivités publiques en Suisse ont l’obligation de transposer dans leur réglementation les engagements internationaux de la Suisse. Et les solutions proposées sont souvent prédéterminées par les standards internationaux.» Selon le Professeur et Président de l’institut du droit de la construction, la révision ne déclenchera donc pas de révolution mais proposera notamment comme nouveauté la possibilité de recours systématique contre la décision d’adjudication sur la base de certains critères.

Qualité et innovation reconnues
Après le protectionnisme des années 80 et le néolibéralisme des années 90, place au développement durable, véritable objectif d’Etat. Gouvernance, qualité, durabilité et innovation, tels sont désormais les mots clés. Ainsi, l’Etat se doit d’adopter une stratégie de responsabilité sociale entrepreneuriale (Corporate Social Responsability). La concurrence axée sur le prix devient moindre pour reconnaître l’importance de la qualité et de l’innovation. «Les soumissionnaires innovants attirent expressément l’attention du pouvoir adjudicateur sur le fait que l’on pourrait avoir mieux et plus innovant si la demande était moins gouvernée par le prix», déclare Marc Steiner, juge au Tribunal administratif fédéral II. La solution viendra sans doute par une gestion consciente des conflits d’objectifs.

Pour concrétiser ces différents propos, parole a été donnée à deux des adjudicateurs les plus importants du pays, à savoir les Chemins de Fer Fédéraux (CFF) et l’Office fédéral des routes (OFROU). En présentant le projet «Léman 2030», Bernard Pittet, directeur adjoint de ce programme auprès de la régie ferroviaire, a mis l’accent sur l’opportunité inédite que constitue «Léman 2030» en termes de développements architecturaux et urbains. Sans oublier l’aspect humain: «La gestion de ce programme d’envergure repose sur trois piliers : la gouvernance stricte, le recours à une bonne planification et gestion des risques, ainsi que les collaborateurs. Ces derniers contribuent en effet à ce que les besoins des clients finaux soient compris et satisfaits.»

Transparence et égalité de traitement garanties
Acteur incontournable des marchés publics, l’OFROU a conscience de sa responsabilité. Il s’efforce de garantir transparence, égalité de traitement et confidentialité dans le cadre de procédures claires et uniformes. Son vice-directeur, Jean-Bernard Duchoud, l’a rappelé : «L’OFROU est tenu de respecter les lois internationales et nationales. Ces prescriptions imposent dès lors que les marchés soient adjugés à l’auteur de l’offre la plus avantageuse sur le plan économique et pas obligatoirement la moins onéreuse.» Pour garantir cette unité de traitement et de procédure, l’OFROU a édité un manuel des marchés publics permettant aux soumissionnaires de bien comprendre les appels d’offres et les dispositions légales s’y référant. Les documents d’appel d’offres présentent pour leur part de manière détaillée l’objet de l’appel d’offres. «Les soumissionnaires ont ainsi une vision complète et transparente des critères servant à l’évaluation de leur offre», poursuit Jean-Bernard Duchoud. L’évaluation des offres est également soumise à un contrôle strict et permanent. «L’indépendance et l’impartialité de l’ensemble des personnes impliquées doivent être garanties durant toute la procédure», explique le vice-directeur. A ces mesures s’ajoutent encore des critères de qualification, permettant de juger si le soumissionnaire est capable d’exécuter le mandat. Enfin, informer les soumissionnaires des résultats de l’évaluation, en proposant notamment des séances de débriefing, fait également partie de la démarche de l’OFROU.

Dernier orateur de la journée, le Chanoine de l’Abbaye de Saint-Maurice Thomas Rödder n’a pas hésité à démontrer certaines similitudes entre son Abbaye et les entreprises actives dans la construction d’infrastructures en mettant en valeur le binôme indissociable que sont la valeur et la pérennité. «Nous avons la responsabilité de connaître notre propre histoire, d’assurer le présent et de préparer l’avenir. Nous poursuivons ainsi des objectifs communs en assumant notre responsabilité de répondre aux défis pour construire l’avenir. Mais gardons à l’esprit la valeur de la pérennité et la pérennité de nos valeurs ! » Une note spirituelle bienvenue dans un milieu dominé par un pragmatisme à toute épreuve.

La Journée Infra
La Journée Infra est le rendez-vous principal annuel des constructeurs suisses d’infrastructures, dans le cadre de laquelle politiques, maîtres d’ouvrages, concepteurs et entreprises de construction échangent chaque année leurs points de vue sur la politique en matière d’infrastructures et de transports. La Journée Infra en Suisse alémanique a lieu pour sa part en janvier à Lucerne.

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Renseignements

Adrian Dinkelmann
Directeur
058 360 77 70
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