Il faut une vraie vision pour les infrastructures

Blog  > Il faut une vraie vision pour les infrastructures

Tant au niveau national qu’à l’échelle cantonale, les projets d’infrastructures manquent d’une vision claire à moyen et long terme. C’est ce qui ressort de la Journée Infra qui s’est tenue aujourd’hui à l’EPFL. Alors que la votation sur le tunnel de réfection au Gothard se rapproche, que se développent les agglomérations et que se renforce la pendularité, le thème des infrastructures se fait toujours plus actuel. Leur construction, leur entretien et, surtout, leur financement ne peut plus être tributaire d’une politique régionaliste et myope.

L’importance fondamentale pour la prospérité du pays de bénéficier d’un réseau multimodal efficient n’est plus à démontrer. Même si il est vrai que les projets se multiplient et que nombre de réalisations sont en cours, une analyse plus précise montre que la gestion globale des infrastructures est encore trop fragmentée. Bien trop souvent, chaque commune et chaque canton travaille de son côté sans aucune concertation avec ses voisins. Les usagers, pourtant, toujours plus mobiles, dépassent allégrement les frontières administratives. Un dialogue resserré et modus operandi commun ne pourrait amener que des avantages en terme de synergies, de meilleure organisation et d’économie de moyens. En ce qui concerne les projets d’envergure et malgré leur utilité démontrée, leur réalisation reste par trop souvent tributaire d’enjeux politico-politiciens du moment. Là encore, une planification et un financement raisonnés sont indispensables.

Ces réflexions ont servi de fil rouge à la Journée Infra qui a réuni aujourd’hui quelque 200 professionnels du secteur à l’EPFL. L’organisation regroupe les entreprises constructrices d’infrastructures. Dans ses mots d’introduction Tobias Meschenmoser, membre du comité central, a rappelé les enjeux liés à la votation sur la construction du second tube du Gothard. Troisième plus long tunnel routier du monde et plus importante liai-son nord-sud du pays, le Gothard est traversé chaque jour par 17’000 véhicules. En service depuis 35 ans, il aura très bientôt besoin d’une réfection complète. Le Conseil Fédéral et le Parlement proposent de construire un second tube avant d’entreprendre la réfection du premier. Au final, le rapport avantages/coûts est indé-niable, la sécurité est augmentée et l’importance économique du tunnel renforcée. Les usagers ne subissent pas de nuisances et une valeur ajoutée pour le long terme est créée. Le maintien d’un seul tube et sa ferme-ture totale durant la période de travaux n’est ni économique, ni raisonnée.

Sous l’impulsion d’Ivan Frésard, journaliste et modérateur du jour, Nuria Gorrite, Conseillère d’Etat, Cheffe du département des infrastructures et des ressources humaines du Canton de Vaud, Luc Barthassat, Conseiller d’Etat genevois chargé du département de l’environnement, des transports et de l’agriculture, Pierre Goetschi, Président central du TCS et Jean-Daniel Faucherre, Vice-Président de l’ASTAG ont donné lieu à un riche dé-bat. Entre les besoins des uns, les souhaits des autres et les réelles possibilités financières, le thème « Jusqu’où doit-on aller ? Jusqu’où peut-on aller ? » a pris tout son sens ! Nuria Gorrite a reproché aux oppo-sants systématiques leur vision individualiste d’enjeux vaste et d’intérêt commun que représentent les infras-tructures. « Cette attitude est égoïste et coûteuse ! », a-t-elle dit. Pour sa part, Luc Barthassat a rappelé la problématique frontalière. « Chaque jour, quelque 550’000 passages sont enregistrés aux frontières du Canton de Genève. Plus de 80% de ceux-ci sont effectués en véhicule individuel. Le dialogue est parfois plus compliqué entre les cantons qu’entre les pays ! », a-t-il ironisé.
Détaillant le fonctionnement et les avantages du futur fond FORTA, actuellement en examen aux chambres fédérales, Pierre Goetschi a relevé le manque de précision quant à l’achèvement du réseau actuel ou à l’élimination des goulets d’étranglement. Dépassant les anciens clivages dans lesquels trop de politiciens semblent encore figés, Jean-Daniel Faucherre a plaidé avec force pour une politique de transport globale, pour le rail et pour la route. «L’utilisation détournée des fonds est le problème central, a-t-il martelé, les usa-gers de la route paient pour tout !» Dans son exposé final, le philosophe Luc Ferry,a appelé au célèbre éco-nomiste Schumpeter, pour rappeler que ce qui alimente la croissance tient essentiellement à la création de nouveautés. « Pour réussir ce nouveau passage, notre société doit également surmonter certains freins à l’innovation», a-t-il dit.

Thèmes liés

Construire des projets d’infrastructure économiquement et non à bon marché

jeu 21.1.16 - Aujourd’hui, les projets d’infrastructure sont le plus souvent attribués à l’offre la moins chère. Lors de la Journée Infra,...

En savoir plus